Photographe, réfugié, roi

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Carnet de voyage d’une famille entre Phnom Penh et Paris et le retour

Nous faisons escale à Guangzhou, la capitale de la province de Canton, ancien terminus sur la route de la soie. À quelques encablures de là se trouve l’industrieuse Shenzhen, puis Hong Kong où une partie de ma famille est exilée. A-kong, mon père, ira leur rendre visite plus tard dans l’année. Pour l’instant, nous avons un autre voyage à faire : celui qui nous ramènera quarante sept ans en arrière, avant ce long épisode en France qui recouvre presque l’intégralité de ma vie mais qui pour lui aura été une longue bascule de l’autre côté du monde.

Qui dit aéroport dit sécurité et qui dit Chine dit contrôle, nous voici donc au point de contrôle de l’aéroport international de Baiyun où des agents tout ce qu’il y a de plus austères vérifient que nous ne transportons rien de suspect. Nous passons en premier au scanner, et A-kong prend son temps. Quand enfin l’image diaphane des entrailles de sa valise s’affiche sur l’écran, les agents ont la surprise d’y voir très clairement un couteau de trente centimètres, paisiblement allongé aux côtés de douze boîtes de Doliprane (paracétamol) 1000mg, cent quatre-vingts masques COVID (qu’il offrira plus tard à ma cousine) et huit batteries d’appareil photo — A-kong souffre d’une compulsion scopique assez sévère. Une conversation en mandarin s’engage alors entre l’agent et mon père qui espère bien convaincre cette femme de ne pas confisquer son couteau « à fruits ». Pendant ce temps Insa, mon épouse, s’interroge sur la fiabilité du service de sécurité de Schiphol Luchthaven, ma fille Elly lève les yeux au ciel et mon fils Robin feint de regarder son smartphone (sans réseau). Moi, j’observe mon père adopter une posture familière, celle d’un homme de bonne foi qui implore la clémence de son prochain supérieur. Cette fois-ci, sa supplication n’a que peu d’effets. Cependant, je sais qu’elle a déjà fonctionné… Au moins une fois…

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